Film: Le traître - Il traditore

Laurent (VU) a dit:
Le film le plus attendu de l'année se révèle… un peu trop attendu!

Certes, pas mal de séquences éblouissantes (les dialogues entre TB et le juge Falcone; la monstrueuse confrontation avec Pippo Calo; l'énorme délire fellinien lorsque le maxi-procès commence; les jeux sur le langage, glissement entre italien, sicilien, portugais du Brésil; le morceau de Nils Frahm qui surgit lors du procès Andreotti; la vision hystérique de la prison sous surveillance, à la fin; etc.…),

Certes, les acteurs, pas seulement Favino vraiment au sommet de son art (même si son Buscetta est plus simiesque que le vrai, un dandy plastico-bistouri), mais aussi le très, très, très impressionnant Fabrizio Ferracane dans le rôle de l'ordure faux-derche ultime Pippo Calo (quel sourire!) ; sans oublier la faconde sicilienne du fluet Luigi Lo Cascio.

Certes, la caméra est quelquefois placée depuis des points de vue audacieux!

Certes, l'idée que Riina est campé en troglodyte taiseux et bourru, pas marquant, est excellente, proche d'une certaine réalité (le plus grand boucher de l'histoire de la mafia est juste un plouc).

Mais tout de même, il y a dans ce film beaucoup trop de passages obligés sans grand relief… vus et revus, peut-être trop de fictions récentes de haut vol (les séries, notamment) sont passées par là, ont déjà tout dit, tout montré; peut-être aussi que la vision cette année du grand documentaire sur Toto Riina m'a tant impressionné que sa reconstitution paraît comme un décalque un peu pauvre, relativement à la force phénoménale des personnages réels (cf. la confrontation de TB avec Riina, qui m'a pétrifié chez Mosco Boucault!!!)

Problème principal, enfin : ce héros, Buscetta, reste jusqu'au bout un peu lisse quant à ses motivations, ses idées, son ressenti, son passé…
ok il est vide ce type, il débite ses conneries d'"homme d'honneur", pourquoi pas, mais le film, qui ne croit pas vraiment à cela (voir la remarque à ce sujet de Falcone), n'arrive pas à traiter ce sujet, à donner de l'épaisseur à ce vide, quelque chose comme cela, vous voyez?

Stylistiquement, aussi, le film souffre de son manque d'unité, par moments on est dans du gros barré à la Sorrentino; à d'autres, on joue de la confrontation avec images d'archives, façon Narcos; à d'autres on retrouve les accents d'un drame sombre, sur un mode déceptif, presque éteint… du Bellocchio en somme.

Et enfin ces idées esthétiques convenues, indignes de ce réalisateur : les présentations au début des personnages avec leur fiche, façon tarantinade; ou le retour au vrai Buscetta en archive, sur le générique de fin.

bref, une œuvre décousue, malade, qui sent presque les problèmes de production…








Robert () a dit:
tout à fait d'accord avec Laurent

en même temps assez jouissif, mais aussi très attendu dans cette galeries haute en couleurs et tellement loin de l'horreur absolue de son référent

et surtout loin des fulgurances formelles de Bellocchio