Film: Nyon 2019

Laurent (VU) a dit:
Un petit aperçu des choses vues lors de cette édition 2019 de Visions du réel.

Outre le show Werner Herzog (de retour on stage après sa présentation d'une demi-heure des "Nains ont aussi commencé petits", projeté la veille à l'ECAL ), trois heures d'éructations sardoniques et brutales sans pause, entre bullshit complet et génie de la méthode, deux autres longues masterclasses ont retenu l'attention :
- celle du couple italien Massimo D'Anolfi & Martina Parenti, auteurs d'une belle série de films centrés sur des dispositifs : procédure du mariage traitée de manière comique dans I Promessi sposi et leur grand œuvre à l'heure actuelle, Il castello, dédié à l'aéroport de Malpensa à Milan.
- celle de l'Algérien Tariq Teguia, dont j'ai surtout retenu le devoir de visionner en entier son film "Plutôt Rome que vous", fiction dont les trois extraits montrés lors de la masterclass pointent un grand film jalonné de plans séquences.

Sinon, à noter :
- Norie, long métrage de Yuki Kawamura, touchant, où un Japonais filme son père en pèlerinage sur les traces de son épouse (la maman du réalisateur, donc) disparue dans les années 1980. Le film vaut surtout pour une longue scène fabuleuse, à mi-chemin entre émotion (le père livre enfin le fond de sa pensée) et grotesque (il fait honneur, dans un splendide tablier orné d'un motif d'ours local, au repas qu'on lui sert dans un restaurant grill de Sapporo).

- Piuccheperfetto, moyen métrage de Riccardo Giacconi. Portrait d'un ado pré-délinquant. Bonne idée que de le montrer via un entrelacement de vidéos placées dans des écrans successifs ou juxtaposés, selon les séquences (fond d’écran d’ordinateur avec sélection de fichiers vidéo; autre ordinateur apparaissant dans l'image; puis idem avec téléphones portables; etc.)

- Seven Years in May, moyen métrage brésilien, qui saisit en un très long plan le récit d'un jeune confronté à la drogue et à la violence. Mis en scène au coin d'un feu. Du sous-Pedro Costa.

- The Sound is Innocent, long métrage tchèque/slovaque sur l'histoire de la musique d'avant-garde électronique. La haine habituelle des "talking heads" chez les jeunes documentaristes a poussé la réalisatrice à filmer en travelling des salles où les écrans diffusant les entretiens sont placés comme dans une installation. On se lasse vite de ce dispositif…

- El Guru, long métrage chilien sur un boxeur. Noir/blanc, quelques images stupéfiantes, mais la répétition des situations (surtout des entraînements) ne parvient jamais à créer l'envoûtement (peut-être) recherché.

- Hi AI, long métrage allemand qui met en scène deux expériences de vie quotidienne avec des robots prototypes: d'une part, un white trash acquiert une bimbo artificielle ; de l'autre, une famille japonaise accueille un petit compagnon de vie. On rit d'abord des conversations débiles, et puis, peu à peu, on se fatigue de l'absence de point de vue.

- Lucky Hours, long franco-suisse sans grand relief mais informatif sur l'asile de Saint-Alban en Lozère, bastion secret de l'extrême-gauche surréaliste française depuis l'époque de la seconde guerre mondiale.


- Many Undulating Things, de Chine, mon préféré malgré le didactisme de certaines séquences et son caractère décousu (on change une ou deux fois de braquet stylistique, entre, d'une part, macro-voix off sur des plans larges des chorégraphies exécutées par les humains-fourmis travaillant sur les docks ou glissant sur des tapis roulants et, d'autre part, micro-entretiens avec des individus). Deux heures chapitrées qui prennent pour point de départ la géographie de Hong Kong (son port marchand, ses galeries, ses supermarchés, son parc botanique…) pour proposer un essai historique et culturel sur le monde capitaliste et ses fantasmagories post-coloniales (notamment une belle analyse de la place des ventilateurs dans une scène de Many Splendored Things).



Frederico (pas vu) a dit:
Merci pour ce compte-rendu!