J'aime beaucoup tout le début du film qui se construit en brèves vignettes avec beaucoup d’ellipses, des sauts géographiques, peu de dialogues et un montage... je ne sais pas trop comment le qualifier... pas nerveux, mais... sec peut-être. On coupe là où la scène s'arrête, pas un peu après pour signifier qu'on va passer à autre chose, et on démarre la scène suivante dans le vif du sujet... Malheureusement, le film ne maintient cette forme que pour ce qui fait figure d'une longue exposition. Petit à petit on retrouve quelque chose de plus conventionnel. Du coup, il ne reste plus que le récit, et là... j'ai un peu de peine. Autant sur le fantasme paranoïaque (secondo qui vire narco, alliance cartel et islamistes pour faire passer le Rio Grande à des terroristes) et les questions chères à Charles-Antoine (tu as aimé la boss qui ne respecte pas la fraternité des combattants?), que sur certaines facilités presque scandaleuses. J'ai croisé Laurent l'autre jours qui a écrit un article sur les questions de la surveillance et comment les récits s'articule souvent sur la faillibilité de ces systèmes, les héros les déjouant. Mais ici c'est le scénariste qui déjoue: il nous met des drones partout, mais soudain, quand il faut qu'un personnage se débine à la barbe de tous, le pilote dans sa base du Kansas est parti se fumer une clope... en écrivant ça j'ai un petit doute. Est-ce que le drone est sensé s'être fait abattre? Il me semble plutôt qu'il tire ses missiles au début de la scène, non? PS: Musique assez classe, même si un peu stéréotypée, d'une islandaise qui a bossé avec Pan Sonic et Mùm. |
Ah ton commentaire – sur les trucs secondairement intéressants – me (re)donne envie d'aller voir le film – j'étais peu motivé puisque ni Villeneuve ni le compositeur "expérimental" (forcément, puisqu'il n'est plus parmi nous) ne revenaient sur cette suite… Il est vrai que c'est malgré tout "signé" (puisque Sollima est l'auteur des films Suburra et ACAB (All Cops are bastards), et des séries Romanzo Criminale et (SURTOUT!!!!) Gomorra, bref pas seulement le fils de Sergio, grand cinéaste de l'époque glorieuse du "film de genre" italien, mais le spécialiste des adaptations de polars littéraires transalpins à succès (Cataldo, Bonini, Saviano…) Je ne suis pas sûr qu'il soit un "styliste" comme Villeneuve (quoique, le début de Suburra, avec son long montage alterné), plutôt un bon gestionnaire de narration chorale… On va aller voir (et écouter…) cela! |
Je me renseigne et en effet, Hildur Guðnadóttir remplace Jóhann Jóhannsson!!! Marrant de voir comment Hollywood peut penser à maintenir non seulement un cast et une trame narrative, mais aussi un certain esprit "artistique", en essayant de trouver des équivalents. J'ai écouté un peu le soundtrack de cette Hildur Guðnadóttir, ça sonne en effet moins sombre et minimaliste que le score du premier volet, plus mélodieux et conventionnel, mais tout de même chargé d'une certaine mélancolie… Ah que je suis remotivé. |
Le lien se fait avec Johansson, explicitement, car le film lui est dédié. Va-t-on avoir droit à un 3e volet? Car SPOILER la dernière séquence donne le sentiment que tout n’est pas fini, et que le bon « soldado » sacrifié se réserve une forme de revanche, non? Moins contemplatif que le précédent film, qui alternait séquences explosives et temps d'arrêt. On peut aussi regretter l’absence de Blunt, qui apportait un contraste bienvenu. Ça reste d’un bon niveau néanmoins, avec en effet des ellipses qui dynamisent le récit, et quelques idées de plans jouant sur la profondeur, ou sur un dévoilement brusque du hors champ. Et un travail sur le silence, ou plutôt l'absence de parole, que ce soit dans des scènes d'action commando ou dans ce moment que, pour ma part, j'ai trouvé assez magnifique, la rencontre avec SPOILER un personnage sourd-muet, ce qui tout d'un coup amène une forme de délicatesse dans un univers sanglant. La musique fonctionne bien aussi; comme dans le précédent film, elle participe à construire l'épaisseur de bien des séquences. Comment font-ils, ces Islandais, pour faire ronfler ainsi les graves des contrebasses et des violoncelles? Avec un octaver? Enfin, pour cette question des drones que soulève Frederico, mon interprétation est que SPOILER SPOILER SPOILER comme les Ricains pensent que leur "infiltré" a été exécuté, il n'y a plus besoin de fixer un drone là où se trouve son (supposé) cadavre... ce qui explique qu'il peut ensuite "ressusciter" sans que personne ne s'en rende compte. |
Alors je me rallie à tous les avis supra! En effet ça reste d'un plutôt bon niveau. On essaie de rejouer un peu ce qui faisait le prix du précédent opus, tout en assumant le fait qu'un classique, ça reste indépassable. Dès lors c'est forcément plus conventionnel. Le scénario, d'abord formidablement touffu – détour terroriste, plan "diviser pour régner" des Ricains… – se réduit malheureusement à une simple ligne droite dont on ne comprend plus très bien les ressorts. SPOILER C'est qui les flics qui tendent une embuscade, par exemple, qui les a avertis, pour le compte de qui ils travaillent?. En effet les séquences d'exposition sont passionnantes (la scène du supermarché, notamment, revient dans mes cauchemars…) Et oui, il demeure un peu du ton sombre et dépressif du premier film, mais la musique – fort belle en soi – ne fait trop souvent que reprendre ad lib le "thème" du précédent (cordes qui se tordent dans les graves puis battement régulier de tambour), sans vraiment décider de le pousser plus avant, de poursuivre le travail vraiment, surtout de le mettre au service d'un effet de gradation (qui, dans Sicario 1, nous faisait atteindre des sommets d'angoisse rarement ressentis dans une salle de cinéma). Je suis d'accord avec Vincent sur l'absence regrettable de Blunt (ou de son équivalent). Il est plus intéressant de s'identifier à une novice qu'à des fiers-à-bras qui maîtrisent leur affaire. Villeneuve est le maître absolu de la stupeur progressive, Sollima est plutôt un expert conteur en matière de polar réaliste et social. Ici on a donc droit, pour les figures qui reprennent le flambeau de la naïveté à laquelle on peut s'accrocher, à des personnages bien construits socialement, mais trop juvéniles et surtout secondaires pour se hisser à la hauteur de l'horreur que pouvait ressentir notre héroïne Blunt dans sa découverte graduelle du monde criminel (ici, ça donne la gamine-objet qui finit complètement effarée, et le néo-soldado s'impliquant au point de ne plus pouvoir reculer) Sur ce motif de l'ado recruté par les gangsters, pour le coup, les séries Gomorra (du même réalisateur) et Narcos, plus proche du sujet, vont tellement plus loin, avec leurs clans mafieux qui se foutent complètement de leurs nouvelles recrues, intoxiquées par l'idéologie de la "famille", du "respect" et qu'on manipule en réalité jusqu'à la mort. Autre aspect du premier film qui est repris, le "point de vue" de l'insider (le petit, celui d'en bas, celui qui doit se les farcir dans son petit quotidien, les narcotrafiquants) était plus puissant dans le premier film, parce que plus cérébral (dans Sicario 1, c'était l'homme de main dont on présente peu à peu la famille, qui paraît n'avoir aucun rapport avec l'intrigue A – pour Américain – et qui finit exécuté "au passage"; ici c'est le gamin dont le point de vue et l'avenir (SPOILER) jouent au contraire un rôle assez central dans le récit. On perd en force critique, mais on gagne en cohérence narrative, c'est un choix. Le réalisateur étant un grand showrunner, on ressent tout de même l'idée de faire naître une franchise, comme le perçoit bien Vincent: on prend son temps pour poser les choses, on distribue des éléments pour la suite, etc. et on se permet même de terminer sur un cliffhanger (belle fin suspendue, au demeurant). Drôle de voir aussi (SPOIIIILLLLLEEERRR) comme le film se donne tous les moyens d'aboutir à une fin sans aucun compromis, impressionnante de brutalité assortie d'un constat politique glacial… pour ne pas l'emprunter et revenir sur des bases plus sages! En effet, si l'on finissait vraiment avec l'exécution de Benicio Del Toro, point final; et si le commando dirigé par Josh Brolin les butait effectivement tous, gamine y compris, ainsi que le demandait sa supérieure, ça aurait une autre gueule, n'est-ce pas? Ici on se borne à en caresser l'idée, pour finalement emprunter la voie d'un héroïsme classique en ce qui concerne les deux personnages principaux (l'un survit par miracle; l'autre désobéit et sauve la petite) Malgré tout cela, il y a un respect de la matière originale, notamment dans le ton qui est maintenu, et rien que pour cela, on se réjouit de la suite!!!! Question potentiellement SPOILER: Il s'était pas déjà vengé des salopards qui avaient dissout sa famille dans l'acide, le Benicio??? Ou à chaque film, il va en trouver des autres, encore, à buter au nom de son traumatisme perso? |
Ben oui, j'avais cette même impression, il me semble en effet que Benicio flinguait déjà un gars à la fin du premier volet... Le nouveau serait-il un "prequel"? |
Oui pour les trois premiers quart d'heure d'exposition mais après quel ennui. |