Film: Get out

Vincent () a dit:
Je surnote à trois, car le film, si on l'évalue en fonction de son ancrage générique (thriller horrifique teinté de grand-guignol et de comédie potache), n'est pas aussi réussi que certains avis critiques veulent bien le faire croire. Néanmoins, et c'est ce qui me conduit vers le 3 étoiles, la dernière demi-heure offre une perspective de réflexion très stimulante sur le racisme et ses motivations, perspective psychanalytique qui s'écarte, me semble-t-il, de ce que l'on trouve dans d'autres œuvres de fiction. SPOILER SPOILER SPOILER Dans la mesure où les Blancs de cet univers ne visent pas simplement à réduire les Noirs à l'état d'esclaves (perspective répétée par ailleurs par un des personnages secondaires du film, le side-kick à fonction "comique"), mais à s'approprier leur corps pour se doter de capacités nouvelles (ou retrouver ces capacités qu'ils ont perdues), le film indique que, derrière le mépris ou la haine de l'autre, se niche en réalité une représentation fantasmée de cet autre quant à sa force vitale, son énergie "naturelle", fantasme qui mêle crainte de se voir surpassé (cf. Jessie Owens aux JO de Berlin, origine traumatique du projet forgé par le grand-père dans cette famille de fous) et envie de s'élever vers cet état de plénitude vitale. Le racisme comme issu d'un désir refoulé de devenir l'autre, je trouve ça plutôt original (à nouveau dans le domaine de la fiction, car la psychanalyse et l'anthropologie ont déjà mis au jour un tel renversement du désir en haine).

Par ailleurs, comme le projet de cette famille paraît débuter concrètement dans les années 1970-1980, les évocations fugaces de deux Noirs qui ont réussi dans le monde des Blancs – le golf avec Tiger Woods et la politique avec... Obama – paraissent suggérer que ces Noirs sont... en réalité des Blancs ayant investi le corps de ces Noirs (dans cet univers fictionnel). De fait, dans notre monde actuel, il s'agit alors de voir que c'est un même mécanisme de transfert, d'incorporation de caractéristiques autres qui est nécessaire pour qu'un membre d'une "minorité – les Noirs, mais on pourrait aussi évoquer les femmes – puisse accéder au même "pouvoir" que les dominants (blancs et masculins). Le rapport de force, le figement des stéréotypes sont tellement puissants que ce sont les Noirs (ou les femmes) qui doivent devenir des Blancs (ou des hommes) pour "réussir", se soumettre et incorporer les normes des dominants pour cesser – peut-être – d'être des dominés.

Et, non, si j'écris cela, ce n'est pas parce que Charles-Antoine a investi mon corps.


Charles-Antoine () a dit:
Mais tu n'es pas noir, Vince! Pourtant, je n'aurais pas mieux dit, sans parler du fait que l'on retrouve ici un schéma prototypique de la glorification masculine mais au service cette fois d'un homme noir: SPOILER; SPOILER, SOILER, l'affirmation de la subjectivité masculine supérieure de l'artiste (ici, photographe) sur une culture de masse mystifiante/hypnotisante classiquement (aux Etats-Unis) féminine.

A saluer, chez Pathé, la programmation d'un film d'horreur en vo plus de deux semaines.


Robert () a dit:
certes par rapport à l'analyse pertinente de Vince, mais après une bonne première partie jusqu'à cette 1ère scène d'hypnose, je décroche total quand cela vire en transplantation de cerveaux dans les sous-sols...

étonnant que vous ne fassiez pas le parralèle avec Cure for Wellness, qui m'a tout autant ennuyé...

l'humour black sauce TSA (en plus d'être génétiquement plus forts les noirs sont aussi plus drôles que les blancs) sauve la Barak...ahahah