Film: The International - L'enquête

Frederico () a dit:
Je sous-note (malgré Owen, Watts et Tykwer) pour marquer un désaccord fondamental que j'ai avec ce film: Il aborde un sujet d'une importance extrême, d'une brûlante actualité, mais est absolument incapable de transformer en une fiction ses énormes enjeux. Comme dans Michael Clayton, on substitue au crime véritable, au crime réaliste, un crime cinégénique, rocambolesque, débile. Newsflash: la criminalité en col blanc, ce n'est pas des armées de goons qui se tirent dessus dans des musées.

L'échec absolu de The International c'est que le film est même incapable d'articuler la nature de l'opération criminelle couverte à grands coups d'assassinats, car, jusqu'à preuve du contraire, la vente d'armes n'est pas une activité illégale.

On peut peut-être se consoler en se disant qu'au moins le banquier (chouette acteur d'ailleurs) ne fait pas du kung-fu...


Charles-Antoine () a dit:
2.5, un scénario bien bétonné, sans doute supérieur au traitement qu'il reçoit, même si l'ensemble demeure plus que digne d'intérêt avec un filmage assez alerte par moments.


Laurent () a dit:
Dissipons d'emblée le malentendu que la bande annonce (formidable) avait pu engager : il ne s'agit pas (du tout) ici d'un beau thriller post-Bourne avec action étirée à mort sur fond de pulsations technoïdes infernales.

Tout au plus Tykwer (on oublie de spécifier que c'est l'auteur de Winterschläfer, de Lola Rennt et du Parfum qui est aux commandes, le plus grand cinéaste allemand depuis Herzog…) réveille-t-il la sono pour l'une ou l'autre de ses séquences de suspense (l'assassinat à Milan), mais toujours sur le même tempo empreint de lenteur déceptive (très conspiration-seventies tout ça). A partir d'une trame poussive sans grande vivacité (c'est le propre même du film, personne n'y bouge véritablement, ou à l'inverse, ce qui revient au même, fait des kilomètres pour pas grand chose), le film travaille les topiques contemporaines de la désagrégation des valeurs, du voyage immobile propre à la mondialisation de la télé-communication et donc de la télé-surveillance, etc.

Rien de bien original donc, mais l'œuvre révèle peu à peu sa singularité et son intelligence au fil d'une succession d'idées visuelles formidables, toutes basées sur des non-dits ou des faux-semblants (un meurtre plus rapide que la perception oculaire ; une conversation à l'aveugle en SMS; l'œil qui parcourt en sens inverse la trajectoire de deux balles pour pointer le lieu originel de la frappe; un contrôle de douane qui signale le passage d'une jambe en métal, etc., etc., sans oublier la seule séquence d'action du film où on joue la durée, à savoir un méga-bousillage jouissif en règle de l'infect barnum de l'art contemporain.



Vincent () a dit:
Comme certains le signalent, la thématique et la présence de Clive Owen poussent à faire des comparaisons avec un film comme "Duplicity". J'ai trouvé "The International" plus convaincant – peut-être parce que plus sérieux, sans cet aspect "comédie d'espionnage" qui fait le fond de l'autre film susmentionné. Il y a également quelques belles idées cinématographiques (j'ai beaucoup aimé le gun fight dans le Guggenheim, même si cette scène – par son traitement "géométrique" (circularité de l'espace, symétrie axiale dans le positionnement des acteurs) – m'a fait penser... à quoi? à du John Woo? ou à d'autres réalisateurs asiatiques?), quelques ellipses qui m'ont plu (vers la fin par exemple, cette voiture qui entre dans un tunnel sans en ressortir, signalant que le négociateur de l'IBBC se fait vraisemblablement dessouder...), et une noirceur plutôt "bienvenue" – même si elle est également "convenue" (impossible d'arrêter les multinationales tentaculaires, infiltrant et corrompant tous les réseaux, etc.). Le fait que le personnage central ne puisse pas se libérer de sa frustration – c'est même pas lui qui descend le grand méchant manitou... il ne peut même pas sublimer son inactivité érotique en tirant CE coup-là – fait aussi l'intérêt narratif et axiologique du film.