Difficile à trancher: d'un côté un film à la facture minimaliste, vraiment bien fichu, qui parvient à mettre parfaitement en phase la radicalité de son propos avec celle de son projet esthétique. Et puis de l'autre, justement, la dite radicalité... Pour ceux qui ne le savent pas, Hunger focalise sur les revendications pour le statut de prisonnier politique des militants de l'IRA dans les années 1980, et plus particulièrement sur la lutte de Bobby Sands et sa dernière grève de la faim. Si le film décrit assez bien les conditions peu glorieuses d'incarcération sous Thatcher, toute la deuxième partie s'appesantit sur la dégradation physique du personnage avec un degré de complaisance qui, jusqu'ici, avait seulement été atteint par "Passion of the Christ". Et il n'y a pas de hasard, puisque le film est produit par ICON, la société de Mel Gibson (j'aurais dû me méfier en voyant apparaître le logo), et que tout le reste du métrage se résume à un pénible exercice de masochisme masculin qui, une fois encore, vient magnifier la volonté et l'endurance masculines face à une Première ministre littéralement invisible et invincible... Le plus triste, c'est que, en conformité avec ce schéma, le film évacue rapidement toute la teneur réellement politique ou même biographique (Sands était devenu écrivain en prison) du propos, pour se centrer sur cette souffrance masculine insupportable. Seule subsiste une très belle scène de dialogue entre Sands et un prêtre (en plan fixe pendant près de 14 minutes) qui, selon moi, met en exergue de façon parfaitement involontaire l'absurdité des moyens employés par le soldat de l'armée républicaine. |