Je trouve une fois de plus qu'il y a un certain gâchis de talent dans cette histoire. Si de faire des lines et un line delivery tout pourri est un choix stylistique, et bien c'est un mauvais choix car il flingue complètement le film. Dommage car une fois de plus chez Shyamalan, quelle grâce dans le film-making! Et dire qu'il avait même laissé son indigeste prêchi-prêcha à la maison cette fois! |
Un peu décevant de prime abord, ce "Happening" me gagne peu à peu, comme souvent avec Shyamalan, notamment en raison de la cohérence de la mise en forme, de sa capacité à subordonner tous les éléments au propos du film, de la musique, des références hitchcockiennes, de la beauté et de la force suggestives des cadrages, de l'humour... Hormis la banalité du discours (perte du lien social dans un environnement soumis au règne de la postmodernité; position dont Bernard Stiegler s'est, certes en préconisant des solutions différentes, fait l'apôtre en France), je suis frappé par l'audace du jeu distancié des acteurs, qui semblent tous ne se parler qu'à eux-mêmes, du caractère délié de l'enchaînement des scènes qui, elles aussi, semblent redoubler la fragmentation existentielle de cette société au plan de la structure du récit (pensez à ces petites phrases isolées dans L'Etranger), de la justesse de la composition des cadres, l'évolution du rapport entre les personnages et les éléments naturels... Ce film souffre néanmoins des mêmes problèmes que les autres films de Schyamalan: redondance d'abord (quel besoin a-t-il de nous infliger ce dernier passage télévisuel inutile!!), un peu comme dans The Mist. Et puis le propos - tout aussi réac que le dernier Indiana Jones dans son rapport à la technologie (avec lequel il partage une scène de visite de maison artificielle assez déconcertante)-, se situe dans la dialectique classique mais éculée de la recherche d'un équilibre entre science (le mathématicien dont le calcul froid l'amène à une compréhension trop tardive de l'événement) et nature (incarnée dans ses excès par la marâtre isolationniste et "batesienne" de la dernière maison). Dommage enfin que tout cela se fasse une nouvelle fois aux dépens de la femme, ici porteuse de tous les maux et dont la rédemption réside dans… la maternité (dernier espoir de la reconstruction du lien social). |